Premier jour à l’école et lien de confiance : faciliter les transitions émotionnelles. Par Buddi Shrestha au Népal

23 Juin, 2025
Buddi Shrestha, directeur des Opérations Népal de Planète Enfants & Développement

À l’occasion du mois de la parentalité, Buddi Shrestha, notre Coordinateur de programme au Népal, nous parle de la construction des premiers liens de confiance, notamment lors du passage de la cellule familiale à l’école maternelle.

C’est l’hiver dernier que nous avons visité, à l’occasion d’une étude de faisabilité visant à lancer un projet pour la Petite Enfance, une grande école publique. Avec plus de 2 500 élèves et une bonne réputation (cours en anglais, respect de normes internes, caméra de surveillance…), l’école semblait impressionnante à première vue. Cependant, notre visite dans une classe de maternelle a soulevé une question souvent négligée.

Dans une salle colorée, de taille moyenne, où se trouvaient 35 jeunes enfants, j’ai assisté à une scène bouleversante. Une petite fille de 4 ans, récemment inscrite, sanglotait de manière incontrôlable tandis qu’une enseignante tentait de la consoler. Lorsque je me suis approché, l’enfant s’est échappée des bras de l’enseignante, a couru vers moi et s’est accrochée fermement à mon cou, suppliant d’être ramenée à sa mère. Ses cris — « Je veux aller avec ma maman » — reflétaient une profonde détresse émotionnelle. Il était clair qu’elle était bouleversée, effrayée et incapable de trouver du réconfort dans cet environnement inconnu.

Ce moment m’a semblé illustrer un défi largement répandu au moment de l’entrée en maternelle au Népal : l’absence de soutien structuré pour le transfert du lien d’attachement, cette transition émotionnelle cruciale qui consiste à passer de l’attention parentale, en particulier l’attachement maternel, à la confiance envers les enseignants ou les personnes qui s’occupent des enfants. Au lieu d’une approche centrée sur l’enfant, de nombreux
enfants sont laissés de force à l’école, parfois après avoir été menacés, réprimandés ou rassurés de manière irréaliste. La rentrée scolaire est souvent accompagnée d’images troublantes d’enfants traînés en larmes à l’école, comme si la conformité était la priorité par rapport à la préparation émotionnelle.

Avec plus de 2,4 millions d’enfants âgés de moins de 5 ans au Népal, il ne s’agit pas d’un problème marginal, mais d’une préoccupation systémique qui nécessite une attention urgente. L’expérience du traumatisme causé par la séparation forcée, le manque de tendresse dans la gestion des transitions, la rupture de confiance que vivent les enfants lorsque les promesses ne sont pas tenues et la transition mal guidée de la maison à l’école soulignent tous la nécessité de pratiques plus compatissantes et adaptées aux stades de développement des enfants.

Consciente de cela, Planète Enfants & Développement s’est activement engagée auprès des enseignants et des parents dans 48 écoles de Gorkha, en mettant l’accent sur le renforcement de la sécurité émotionnelle, l’atténuation du changement et la création d’espaces stimulants qui respectent le monde émotionnel des jeunes enfants dès leur premier jour d’école. Le projet a contribué à sensibiliser les enseignants et les parents à cette question et à les informer par les messages suivants.

Message aux enseignants

Les enseignants jouent un rôle essentiel dans la transition des jeunes enfants de la maison à l’école. Établir une confiance émotionnelle par des salutations chaleureuses, un ton doux et l’utilisation des prénoms des enfants crée un sentiment d’appartenance. Une routine quotidienne cohérente, telle que commencer la journée par un cercle, offrir des « coins douillets » calmes, et encourager les jeux en petits groupes, aide les enfants à se sentir en sécurité, considérés et connectés.
Les enseignants doivent rester attentifs aux signaux émotionnels, offrir réconfort et rassurer si nécessaire. Encourager les enfants à exprimer leurs sentiments et valider leurs émotions renforce leur intelligence émotionnelle et favorise leur développement socio-émotionnel. Il est essentiel de faciliter le transfert progressif du lien d’attachement avec les parents vers les enseignants, par exemple en permettant aux enfants de garder une photo de famille, leur jouet préféré ou un objet réconfortant à proximité.

Message aux parents

Au début, rester dans la classe ou à proximité aide les enfants à se sentir en sécurité et soutenus. Réduire progressivement cette présence permet à l’enfant de prendre confiance en lui et de nouer de nouveaux liens à son rythme. Apporter un jouet familier ou un objet réconfortant, ou placer une photo de famille dans la classe, peut apporter un réconfort émotionnel. Il est important que les parents évitent la coercition, les fausses promesses ou la pression scolaire pendant cette phase délicate. Plutôt que de se concentrer sur les premiers résultats scolaires, privilégier le bien-être émotionnel, le sentiment de sécurité et l’indépendance de l’enfant permet de poser des bases solides pour un apprentissage dans la joie et durable.

Nos autres actualités :

Partager ceci